Conversion massive au superéthanol-E85 pour les véhicules de l’État, et débat fiscal en toile de fond. D’un côté, un marché jugé plus vert et plus économique. De l’autre, une réforme qui pourrait en rogner l’intérêt. Ce paradoxe très français mérite un décryptage nuancé.
Une conversion d’ampleur inédite
L’appel d’offres du ministère de l’Intérieur a été remporté par FlexFuel Energy Development. Le contrat prévoit l’équipement de 40 200 véhicules sur quatre ans, avec une extension possible jusqu’à 53 900 unités. Sont concernés des modèles de la Police, de la Gendarmerie et des Douanes. Cette opération suit deux ans de tests en région PACA et devient la plus vaste conversion publique vers le bioéthanol. Les premières formations de techniciens débuteront en novembre 2025. FFED assurera l’installation, l’homologation et une hotline dédiée.
Atouts économiques et écologiques
À environ 0,70 €/L en moyenne, le superéthanol-E85 reste le carburant le plus abordable grâce à un avantage fiscal ancien. L’État anticipe près de 700 € d’économies par an pour 13 000 km, et plus de 1 000 € pour 20 000 km. Côté environnement, le spécialiste évoque jusqu’à –50 % de CO2 et –90 % de particules fines. Autre atout, une production et une distribution majoritairement françaises, qui renforcent une forme de souveraineté énergétique. Pour une flotte publique, la cohérence budgétaire et l’impact carbone y trouvent leur compte.
Fiscalité: le grand écart
Problème, l’annonce arrive peu après que le gouvernement Lecornu 2 a envisagé de réduire ou supprimer l’avantage fiscal qui fait la compétitivité du superéthanol-E85. Selon la filière, le litre pourrait grimper de 0,40 à 0,50 € d’ici 2028, autour de 1,10 à 1,20 €/L. L’association 40 Millions d’automobilistes juge la mesure contre-productive, tandis que les producteurs alertent sur la perte d’attractivité. Un amendement pour supprimer cette modification a été déposé et serait en bonne voie. Le carburant pourrait donc conserver ses tarifs, mais pas grâce à l’État qui choisit l’E85 tout en fragilisant son modèle pour le grand public.
Que retenir côté automobilistes
Le message est double. Oui, la conversion publique confirme la maturité des boîtiers E85 et un intérêt financier réel quand l’avantage fiscal est préservé. Mais la trajectoire de taxe conditionnera la rentabilité pour les particuliers. En attendant l’issue du PLF 2026 et de l’amendement, mieux vaut rester attentif aux évolutions de prix à la pompe. L’encadrement évoqué dans la flotte d’État rappelle aussi l’importance d’une installation homologuée et d’un suivi technique sérieux.
En synthèse, l’État enclenche une conversion record au superéthanol-E85 pour ses voitures, saluée pour ses coûts et ses émissions. Mais la cohérence globale dépendra d’une fiscalité lisible. Sans cap clair, difficile d’aligner exemplarité publique et intérêt privé.

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